Un des premiers prêtres du XX° sc. à ouvrir son presbytère aux pèlerins :
– extraits de l’homélie des obsèques :
[…]Pas d’évangélisation sans proximité et solidarité éprouvées. La nouvelle évangélisation actuelle n’échappera pas à ce temps de l’incarnation nécessaire. Quittons les côteaux ondulés de Lembeye où a pris naissance la légende Ihidoyenne pour affronter la cité des remparts.[…] C’est à Navarrenx que l’Europe est venue à lui. Après avoir patiemment labouré les six villages de sa paroisse, établi une relation personnelle avec beaucoup de ses paroissiens, étonné bien des jeunes par ses exploits sur le fronton, animé une rubrique sur une radio cantonale, notre curé pensait peut-être récolter paisiblement fruit de ses multiples contacts personnels dans lesquels il excellait. […] toujours mettre en valeur l’hôte du moment. Oui, c’est bien l’Europe qui est venue frapper à sa porte sous la forme de ces cohortes de pèlerins de St Jacques qui trouvèrent chez lui, tous les soirs, gîte, soupe et cœur ouvert. Son presbytère, qui était loin d’être conforme aux normes d’hébergement en vigueur, est devenu au fil des ans la référence spirituelle que l’on sait. Cet accueil sans visa lui valut quelques surprises désagréables mais n’altéra jamais sa capacité extraordinaire de toujours mettre en valeur l’hôte du moment. Laurence Lacour et d’autres après elle, en ont largement témoigné. Chacun ressortait de chez lui avec le sentiment d’être unique et de compter réellement dans l’histoire des hommes. Pas d’évangélisation sans un respect immodéré pour tout homme et pour toute femme. La vie paroissiale, la priorité donnée au laïcat, le partage des joies et des peines familiales, la réponse aux innombrables mails des anciens pèlerins ont été le quotidien du curé de Mauléon et de la Soule qui était encore pour lui une terre nouvelle, inconnue mais très vite adoptée. « C’était le type même du prêtre diocésain, sans ignorer toutefois son côté franc-tireur par rapport aux institutions qu’il jugeait trop cléricales. » me disait l’un de ses confrères. […] La vie de tous les jours suffit comme support à ma prière […]. Sa parole n’était pas un simple écho répétitif de ses lectures ou de ses recherches. Elle s’enracinait dans la riche expérience de ces rencontres chaleureuses qui avaient allumé dans l’existence de chacun une sorte de buisson ardent où Dieu se rendait présent. « La vie de tous les jours suffit comme support à ma prière » disait-il.
J’ai envie de vous dire : « Ne lui volez pas son sacerdoce en admirant l’homme qu’ils étaient et en négligeant Dieu qu’il adoraient! »
Sébastien, tu ne nous serreras plus la main en broyant nos phalanges sensibles. Maintenant, serre-nous plutôt sur ton cœur qui bat de nouveau, branché pour toujours sur celui du Père. Comme tu le disais souvent : « Voilà l’homme ! » Jendia, Jendé !!e
Père Jean Casanave
- hommage du site du diocèse de Bayonne
- hommage de Webcompostella
- prière de l'accueillant par le Père Sébastien
- l'accueil vu par Sébastien IHIDOY
- autres souvenirs... d'un saint ou d'un prophète ? :
Extrait de « Passants de Compostelle »
de Jean-Claude BOURLES (Ed.Payot)
Navarrenx…. Accueil par le père Sébastien Ihidoy dans son presbytère. Bien qu’il s’en défende, c’est l’une des figures les plus marquantes du chemin français. Novateur, esprit éclairé, il est l’un des rares à avoir compris, dès les premiers
frémissements du chemin, l’importance qu’allait retrouver l’aller vers Compostelle. Homme de franc-parler, au regard malicieux et à l’accent rocailleux, il est de ce peuple de rudes Basques, intransigeant pour lui, généreux pour les autres. A ceux qui déplorent l’absence de l’Eglise sur le chemin je dis et répète ces noms associés à ceux du Rouergue et du Quercy : Jacques d’Arthez, Ihidoy de Navarrenx, les franciscains de Saint-Palais, d’autres sûrement dont j’ignore l’existence. Sans doute avec ces quelques-uns nous sommes loin du compte, mai au moins ceux-ci sont-ils là, présents et chaleureux, réconfortants par la parole autant que dans le silence, disponibles malgré l’urgence d’autres tâches, veilleurs sur le chemin, fenêtre allumées dans la nuit.
« C’est vrai que pour les gens, vous qui passez, les pèlerins, vous êtes fort. Et pourquoi ? Parce que vous êtes capables de partir, comme cela, en abandonnant tout. Nous on est là, autour de notre petite vie, et vous, vous êtes des hommes et des femmes de grands moments. Vous réveillez en nous des choses pour lesquelles nous sommes faits et que nous réaliserons jamais. Chacun est fait pour l’aventure humaine, mais combien la vivent ? Les gens qui voient passer sont envieux de votre capacité à exposer votre faiblesse, et paradoxalement n’est pas là justement votre force ? Paul nous dit : »Je porte une écharde dans ma chaire. » On ne sait pas de quoi il s’agit. « Par trois fois j’ai supplié le Seigneur de m’en délivrer, et il m’a répondu : ‘Ma grâce te suffit.’ Eh bien, si je continue de marcher, la force de Dieu agit dans ma faiblesse. » L’écharde, il l’a toujours, mais il fait avec et poursuit sa vie, donc son chemin.
« Je me demande si la société actuelle n’a pas besoin de ces types qui passent, pèlerins et chemineaux. Pour moi, pas de différence, je ne raisonne pas en termes de jugement. Un pèlerin recommandé par ses instances, son carnet, son évêque, et même le serait-il par le pape que cela ne changerait rien, je le considère et considérerai toujours dans et pour son cheminement. Sans être sûr d’ailleurs qu’il soit meilleur pèlerin qu’un autre. Mais ai-je besoin de certitudes ? Bien sûr que non, ou alors je juge. Et comment juger ? Vous pouvez me le dire vous ? Quelqu’un qui n’a ni travail, ni famille, ni projet social, et part en se disant : Je vais chercher une vérité sur ce chemin, celui-là est à mes yeux un vrai pèlerin. Même s’il l’ignore ou nomme les choses autrement. C’est quelqu’un qui a besoin de faire SON chemin. Le fait qu’il soit capable de repartir chaque matin, quel que soit le temps, sac au dos, pour faire ses vingt ou trente kilomètres, sans savoir ce qui l’attend plus loin, où il dormira, si même il mangera, prouve que c’est un homme. Et un homme qui est debout. Profite-t-il des autres ? Pourquoi ne le serait-il pas ? Soyons sérieux, dans une société qui laisse tant de gens démunis, pourquoi lui ne profiterait-il pas chemin et des structures, dîtes-moi ? Et j’ajoute que moi qui homme d’Eglise, je lui dois un accueil qui soit digne de lui. Nous le voyons à chaque page de l’Evangile, §Jésus accueille d’une manière privilégiée celui à qui personne ne fait attention. Agir de la sorte va à contresens d’une certaine logique humaine. Mais il faut accepter d’être à contre-courant de la société, et même parfois de l’Eglise. La liberté du croyant est à ce prix.
« Pour moi, le pèlerin, quel qu’il soit, est toujours un chercheur. Le chercheur d’une vie plus humaine (c’est le dénominateur le plus commun), un chercheur de sens, un chercheur d’étoiles, un chercheur de Dieu (parfois sans le savoir) qui, pour trouver sa part de vérité, prend des risques dans un époque où l’on fait tout pour nous protéger, nous garantir, jusqu’à l’asphyxie. Démarche à contresens, démarche absolue, comment voulez-vous qu’il soit toujours bien compris ? Les pèlerins, je vais vous dire que je les reconnais au premier coup d’œil, dans la rue, dans un groupe, sans sac, bourdon ou insigne, changés, douchés, propres comme des touristes. Je sais que ce ne sont pas des touristes, ni des randonneurs, mais des pèlerins. Je les reconnais, oui. Dans l’église, samedi dernier, il y en avait trois. Je les ai découverts dans la foule, rien qu’aux regards. Les pèlerins ont le regard qui irradie. C’est incontestable. D’autres vous le diront. Non pas le regard brûlé par le soleil ou la fatigue, non, un regard d’ailleurs. Ils irradient. Pourquoi ? Alors là… Sans doute ont-ils en eux une petite étoile. Parce que quelqu’un qui marche comme le pèlerin possède forcément en lui quelques rayons de l’étoile qu’il est en train de chercher. Et c’est cette parcelle d’étoile qui brille dans leurs yeux.
« J’ai reçu beaucoup de pèlerins. Je Les ai écoutés. J’ai beaucoup appris, et j’aimerais que mes paroissiens bénéficient de cette richesse. Le passage des pèlerins, c’est comme dans un fleuve les courants profonds. Ceux que l’on ne voit pas, mais qui entraînent la masse du fleuve. Un courant qui annonce, peut-être, du moins je l’espère, une modification profonde de la société de demain. Pour moi, le renouveau de ce pèlerinage est un signe prometteur avec lequel l’Eglise aurait intérêt à se trouver plus en phase. Elle gagnerait à ouvrir ses portes et son cœur, à considérer les pèlerins comme des pionniers. Puisque comme le dit Jean-Paul II, « la route fondamentale de l’Eglise, c’est l’Homme », pour l’Eglise délaisserait-elle ce chemin historique qui a façonné notre culture et qui trace aujourd’hui – pourquoi pas -la société de demain ? »
Père Sébastien IHIDOY, Navarrenx
Souvenirs de
Jean-Jacques
parti 8 jours pour voir en 1999, le périple fut de 1500 km en 3 tronçons. Ce qui est devenu un pèlerinage se termine à Navarrenx
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15 août 2001 « Un pèlerin de Saint-Jacques-de-Compostelle invité aux innombrables manifestations d’amitié à l’occasion de départ du Père Sébastien Ihidoy ; car l’hospitalité reçue au presbytère de Navarrenx était devenue, à juste titre, quasiment légendaire, d’un bout à l’autre du GR 65, le chemin du Puy. » jusqu’à Compostelle
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La République DES PYRÉNÉES du 21 août 2001
En quelques jours, au début de l’été, la nouvelle avait fait le tour du canton: après vingt ans de ministère à Navarrenx et dans les villages alentour, l’abbé Sébastien Ihidoy allait quitter le Béarn pour la Soule et plus précisément sa capitale, Mauléon.
Un retour aux sources, à une province près, pour ce Basque si bien intégré au Béarn qu’on le regrette encore à Lembeye, la paroisse où il exerçait jusqu’en 1981, avant de connaître Navarrenx. Partout où il est passé, le Père Ihidoy a marqué les cœurs de ses paroissiens, des plus fidèles aux non-pratiquants, englobant « celui qui croyait au Ciel et celui qui n’y croyait pas » dans la même amitié chaleureuse.
Quelles que soient les convictions de chacun, son apostolat n’a laissé personne indifférent. C’est ce qu’a souligné Danièle Vidal, responsable du Conseil pastoral, lors de la messe d’actions de grâces célébrée le 15 août à Navarrenx, en hommage à l’homme qui a su donner une nouvelle dimension à la fonction de prêtre. «Nous voulons vous rendre grâce pour les vingt ans passés avec vous et letravail accompli ensemble », a-telle ajouté au cours de cette cérémonie empreinte de ferveur et d’amitié, concélébrée par les abbés Ihidoy, Haramburu et Iriquin, missionnaire au Bénin, qui a des attaches dans un village voisin
Des heures magnifiques »
Venus de toute la paroisse Saint-François-Xavier, qui regroupe tous les clochers du canton, les fidèles, qui n’avaient pu entrer dans l’église archicomble, se sont pressés à ses portes, sur les places Darralde et Carrérot. L’émotion a atteint des sommets quand un panneau symbolisant les échanges amicaux et spirituels entre le Père et les enfants a été commenté par Chloé, une jeune fille récemment baptisée par l’abbé Ihidoy. « J’ai vibré à toutes les valeurs que j’ai trouvées en vous, j’ai communié àvos événements familiaux, à vos projets, j’ai vécu avec vous des heures magnifiques ». En écho à ce cri du cœur du Père Sébastien, le vin d’honneur servi à tous les fidèles sur le parvis de l’église et le repas qui a réuni 380 convives à la mairie ont donné libre cours à d’innombrables manifestations d’amitié, dont celles exprimées par un proche, Jean Lopez, et un pèlerin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Car l’hospitalité reçue au presbytère de Navarrenx était devenue, à juste titre, quasiment légendaire, d’un bout à l’autre du GR 65, le chemin du Puy.
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